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...Jmulitudes
20 juin 2007

Un an après

Me revoilà. Un an après. Oui, un an que cette histoire est finie maintenant, et voilà que j'ai mon bac. Enfin, les résultats, ça n'est que dans quelques jours, mais je ne me fais pas de soucis.

Et puis, curieusement, je reviens lire tout ça. Non, pas tout, juste quelques trucs, par-ci par-là.
Je me replonge, avec le recul, dans ces vieilles histoires... pourquoi maintenant ? Simplement, je crois, parce que j'en ai le temps ; ce qui me manquait auparavant. Bon, y'a peut-être aussi une autre raison, mais non, je crois que j'y serais revenue de toute façon.

Ce n'est plus à Marien que je m'adresse. C'est au vent, ou a moi-même. Je suis très fatiguée ce soir, un peu de stress pour l'avenir qui m'attend, aussi, et des tas de questions floues dans ma tête ; mais globalement, je suis heureuse en ce moment. C'est les vacances, j'ai de nouveau le sentiment d'avoir quelques amis, et puis voilà,  je vis ; tout ça est bel et bien fini. Et ça me semble loin... Je devais voir Marien, tiens. Je le lui avais dit. Mais j'ai la flemme de le rappeler. Je le ferai peut-être.

Ça me semble loin, dis-je, et si proche à la fois. Je regarde en arrière, tout le chemin parcourru, et ça me laisse plutôt perplexe. Qu'est-ce que je pourrais bien en dire ? J'ai le sentiment qu'il faut que je dise quelque chose, que les mots me brûlent les lèvres sans vouloir vraiment sortir. Inutile d'essayer encore sur mon blog. Alors, je me suis souvenue d'ici. A l'abri des regards.

Je me souviens de la fête de fin d'année, celle d'il y a un an. Je ne me souviens pas tant du concert de Sweet Madness pourtant, ce n'est pas ça l'important. Plus maintenant. Ce que j'en retiens, c'est une ambiance générale de solitude sereine, de ventre noué dont on ne sait plus comment se dépêtrer, et pour cause, on ne peut pas. Alors on hurle au vent, et c'est comme Don Quichotte et ses moulins à vent. On le sait, mais on ne peut pas faire autrement que de se battre quand même, même si personne ne comprend, même si soi-même on ne comprend pas, même si soi-même on sait que c'est en dehors de toute morale. D'où la gène qui s'intensifie, on est si mal qu'on se déteste soi-même en plus du monde entier. Je me suis engueulée avec tout le monde. J'avais peur de perdre mes amis. Je les ai perdus, mais au moins je n'ai plus peur.
Je me souviens aussi, cette fête, de quelques mots de Philippe. Enfin, je ne me rappelle pas les mots, mais il m'avait parlé devant la scène. Je me souviens avoir pensé que ces gens-là, Philippe, et les autres, ce sont des gens que j'aurais aimé connaître. Je me disais ça, ce soir-là. Oui, c'est ça que je me disais. Ça m'avait fait plaisir que Philippe me parle. Et puis voilà, c'est tout. Le voile retombe, et ce sont les larmes dans les buissons, quelques mots à Marien tout de même.

Et finalement c'est toujours la même ambivalence. Cette envie de tout envoyer ballader, de se libérer de tout, de ne plus dépendre de rien. Et cette incapacité à le faire pourtant. Ces attachements qui demeurent, le sentiment qu'il faut rester fidèle à quelque chose, ne serait-ce qu'à soi-même. Pas de liberté, alors, parce qu'angoisse, angoisse de l'absence de sens. On n'arrive pas à se libérer, jamais. Mauvaise foi. Ah, peut-être qu'un jour je le ferai, je partirai, peut-être. Qui sait. Gwendoline pense plus ou moins à la même chose, en fait. Caprice de gamine ? C'est ce que disait ma mère l'autre jour. Je ne sais pas. Angoisse existentielle, surtout, je pense. Mais ça n'a peut-être pas tout à fait rien à voir. Il n'y a que les gamins pour se raconter de histoires autour de leurs angoisses existentielles, il n'y a qu'eux pour se faire un tel cinéma. Grandir, c'est oublier le cinéma, c'est faire la part des choses avec la réalité, mais heureusement il reste Sisyphe heureux.

Marien me disait "Philippe, c'est bien quelqu'un du genre à prendre les gens comme ils sont." Depuis qu'il m'avait dit ça, et encore maintenant, je vois Philippe à travers ces mots. Quelqu'un qui ne juge pas. Quelqu'un de rassurant quelque part. Il y a toujours eu quelque chose comme ça, quelque chose de simple. C'est étrange, ces mots. Je ne sais pas s'ils sont vrais pourtant. Je me le demande, maintenant. On ne se sent pas jugé à parler avec lui, et pourtant, il critique les autres, il se dit hypocrite. Je ne sais pas, je n'arrive pas à savoir. Peut-être qu'un jour je saurai.

Et la guitare, les doigts posés sur la guitare, le frère, la musique, la mort de Dieu. La voix de la mère, la séparation. Dieu, c'est la mère finalement. Ça doit être ça, quoi d'autre ? La maison aussi, c'est la mère. La mère est partout, derrière tout. Tout ce qu'on cherche, c'est la mère. Je pense vraiment que c'est ça. Que ça explique tout, ou presque. En bonne adolescente, je ne me suis pas remise de la mort de Dieu. De la séparation d'avec la mère. En bon être humain, je ne m'en remettrai jamais complètement. Reste Sisyphe heureux. Ces deux mots, là, liés l'un à l'autre, Sisyphe heureux, avec le "i" avant le "y", ces deux mots, je n'ai jamais rien vu... je ne sais pas. Je ne sais pas si mettre des mots là-dessus, ce ne serait pas tout gâcher. Sisyphe heureux, Sispyhe heureux. Il n'y a rien de plus beau et de plus fort que ces deux mots. Il faut s'en souvenir, toujours. Le miracle de ces mots.

La guitare, je disais, la musique. C'était le fil à suivre. Parce qu'il en fallait un, il le fallait. Rester fidèle à quelque chose, à soi-même dit-on, mais l'on sait qu'on se ment. On veut mettre quelque chose sur "soi-même", mais l'on sait qu'on se ment. Soi-même n'est que le résultat du jeu arbitraire des déterminismes sociaux, culturels et individuels, livré à l'angoisse d'une conscience d'elle-même qui se prend pour libre devant le vide béant de l'absence de valeurs objectives, une conscience d'elle-même qui se sent et doit se sentir responsable d'une existence finie et dépourvue de sens qu'elle ne maîtrise pourtant même pas. Cherchez le paradoxe, si seulement il n'y en a qu'un. Chercher, creuser le problème, c'est là l'important. On ne trouve pas de réponses, c'est vrai. Mais on peut comprendre ou est le problème. Il n'y a que ça qui apaise, ou peut-être pas seulement, mais c'est toujours un bonheur de comprendre où est le problème. Mon prof de philo avait raison, c'est à ça que sert la philosophie, c'est ce que disait Wittgenstein, je ne sais plus comment, c'est juste éclairer les choses. Ça n'est qu'en se donnant des objectifs humbles comme celui-là qu'on s'en sort. Et ça marche. Eclaircir les choses. J'aime la philosophie juste pour ça, j'aime la raison juste pour ça. La philosophie ne vaut pas une heure de peine, disait Pascal, il a raison. Se moquer de la philosophie, c'est vraimant philosopher ; il a raison. Ça n'est rien d'autre encore que l'histoire de Sisyphe. Mais écoutez : Sisyphe Heureux. La philosophie ne vaut pas une heure de peine parce que le rocher retombe toujours dans le fond de la vallée. Lucrèce le savait déjà. Mais nous sommes sur terre pour ça, pour pousser le rocher qui retombe, et le pousser encore, sans fin. Lucrèce est un homme incroyable, mais il n'avait pas vu cela. Le rocher, pour lui, c'est l'ambition, le pouvoir ; certes, son Sisyphe à lui s'est peut-être trompé de rocher - mais son Sisyphe à lui n'est pas heureux. Sisyphe heureux, c'est un rocher aussi, mais un autre rocher. Sisyphe heureux, c'est par exemple éclaircir les choses. Situer les problèmes. La raison, le même énorme rocher sur le même versant de montagne, mais avec le sourire. Je ne sais pas, il y a encore un problème quelque part. Je n'y comprend plus rien. Reste Sisyphe heureux, humilité et enthousiasme - mais non passion.

Il faut imaginer Sisyphe heureux...

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  • "L'écriture, ça devrait être un face à face avec soi-même [...], pas une espèce de tentative ratée de créer un reflet de soi par les mots." Alors vouala : Jmulitudes, ou états d'âme de la p'tite Jmule, écrits par la p'tite Jmule pour la p'tite Jmule.
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